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  • Pour une Europe indépendante...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Jean-Michel Quatrepoint au Figaro Vox et consacré à la nécessaire réorientation du projet européen  à la suite du Brexit.

    Journaliste, Jean-Michel Quatrepoint a notamment publié Mourir pour le yuan (François Bourin, 2011), Le choc des empires (Gallimard, 2014) ou Alstom, scandale d'Etat (Fayard, 2015).

     

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    Jean-Michel Quatrepoint : « Organisons un mouvement pour l'indépendance de l'Europe ! »

    FIGAROVOX. - Les électeurs du Royaume-Uni ont choisi jeudi 23 juin que leur pays sorte de l'Union européenne. Cette interruption délibérée du processus de «construction européenne» par le peuple britannique est-elle un événement historique?

    Jean-Michel QUATREPOINT. - Le Brexit marque la fin d'un cycle commencé il y a quarante ans, avec l'école de Chicago, et qui fut incarné par les figures de Margaret Thatcher et Ronald Reagan. La victoire idéologique de cette doctrine se traduisait par l'application de la pensée de Milton Friedman, stipulant l'efficience absolue des marchés, un libéralisme total et toujours moins d'Etat. Mais on observe que l'histoire avance à grands coups de balancier: le néo-libéralisme se voulait la fin de l'Histoire en s'appuyant sur le libre-échange absolu, la globalisation - à ne pas confondre avec la mondialisation - et l'uniformisation du monde sous la bannière anglo-saxonne. Mais ce modèle a subi plusieurs coups d'arrêt. Le premier fut les attentats du 11 septembre 2001 dans les tours jumelles: ils ont été la démonstration des faiblesses d'un monde globalisé et financiarisé, par rapport à des actions terroristes. Le deuxième, ce fut la crise des subprimes en 2008. Le système avait assimilé les attentats du 11 septembre, il n'a toujours pas digéré la crise des subprimes. C'est bel et bien le modèle économique lui-même qui est désormais en bout de course. Les populations se sont aperçu que, contrairement à ce qu'on leur avait affirmé, ce modèle n'était pas - en tout cas n'était plus - gagnant-gagnant: il y avait des gagnants et des perdants.

    Londres et le reste de l'Angleterre sont d'excellents symboles de cette réalité. Les gagnants de la globalisation sont à Londres, ce sont les financiers mais aussi différentes catégories de migrants - parce qu'ils occupent un certain nombre d'emplois en acceptant des salaires plus bas et un faible système de protection sociale. Les perdants ce sont les autres, ceux qui vivent en périphérie, à la campagne, et qui ne voient pas le bien-fondé de cette globalisation ni les progrès que leur apporterait l'UE.

    La globalisation se traduit par une course au moins-disant social et fiscal, voire environnemental. En Europe, la politique d'austérité imposée par une Allemagne qui reste arc-boutée sur un modèle ancien a entraîné une récession. La Grèce est exsangue. Les pays européens ont un fort taux de chômage et un faible taux de croissance. L'Europe n'a pas retrouvé les niveaux de PIB de 2007.

    Ce modèle néo-libéral était sans doute nécessaire il y a quarante ans pour mettre fin aux dérives du keynesianisme. Aujourd'hui, il a trouvé ses limites. Il engendre une grande stagnation qui empêche la croissance. La Chine a ses problèmes, comme les pays émergents. La chute des prix du pétrole a été en partie bénéfique aux Américains et aux Européens, mais a lourdement touché les pays producteurs. Le remède, la seule réponse à cette stagnation généralisée aura été le quantitative easing. Les banques centrales font tourner la planche à billets et ajoutent de la dette à la dette. Mais cet argent ne s'investit pas dans l'économie réelle. Il alimente les marchés financiers, les produits dérivés (600 trillions de dollars), le shadow banking, et la pratique des taux négatifs, une aberration en système capitaliste, qui ne profite qu'à un système financier par ailleurs malade.

    En un mot, le Brexit est la manifestation politique et idéologique de la fin de l'ère reagano-thatchérienne. Et le moindre des paradoxes n'est pas que cette manifestation ait eu lieu au Royaume-Uni.

    Certains commentateurs pointaient l'absence de culture et l'âge avancé des pro-Brexit, en comparaison de l'éducation et de la jeunesse des partisans du maintien dans l'UE. Ce clivage est-il pertinent?

    Il est toujours réducteur de faire du manichéisme sur ce type de sujets. On a observé un déferlement de haine de la part de quelques penseurs notamment en France, à l'encontre du peuple britannique qui a voté pour le Brexit. Kenneth Rogoff, économiste américain (qui fut économiste en chef du FMI entre 2001 et 2003) a même été jusqu'à expliquer qu'une majorité de 52% n'était pas suffisante pour décider un matin de tout plaquer. Ce professeur d'économie et de science politique devrait pourtant se rappeler qu'au lendemain de Maastricht, ceux qui avaient milité pour le non se sont inclinés face au verdict des urnes. On voit donc bien que cette crise du modèle économique se double d'une crise du modèle politique.

    Comment expliquer la manière très hostile dont ont été traités les vainqueurs du référendum?

    Nous sommes passés à un autre stade, celui de la post-démocratie, celui du gouvernement des «sachant» par rapport à une plèbe inculte. C'est cela que disent les Minc et autres BHL. Il y a d'un côté ceux qui savent, et de l'autre les ignorants. Il faudrait donc laisser gouverner «ceux qui savent». C'est une approche que l'on pourrait qualifier de totalitaire. Ou, pour le moins, de non démocratique.

    On sent qu'il existe un clivage, de plus en plus irréconciliable, entre des gens qui voudraient aller plus loin dans l'application d'un modèle qui ne marche plus et d'autres qui s'opposent à ce modèle… mais qui n'ont aucune envie d'assumer la responsabilité du pouvoir. Je pense évidemment à Boris Johnson, mais il n'est pas le seul. Il adopte aujourd'hui le même comportement qu'un Jean-Marie Le Pen hier, qui menaçait le «système» sans vouloir accepter d'endosser des responsabilités. Toute la difficulté aujourd'hui, c'est qu'il faut que les gens de bonne volonté, qu'ils soient européistes ou eurosceptiques, réfléchissent au modèle d'après. Celui-ci ne sera ni keynésien, ni néo-libéral à la Friedman. Ces deux systèmes économiques ont fait leur temps. Il est temps de réinventer un modèle qui soit propre au génie européen. Un modèle qui tienne compte des impératifs écologiques, énergétiques et de la révolution numérique. Un modèle que l'on ne nous impose pas.

    Justement, existe-t-il un «génie européen» qui soit traductible en politique?

    Il n'y aura pas d'Europe fédérale. On le sait depuis des années mais certains font semblant d'y croire encore. Le 30 juin 2009, la cour constitutionnelle de Karlsruhe avait rendu un arrêté stipulant que seuls les États nation étaient dépositaires de la légitimité démocratique. Si l'on croit encore à la démocratie, il faut donc réfléchir à une confédération d'États nations, une communauté disposant de nouvelles structures adaptées.

    Les commissaires n'ont plus leur place, en vertu de quoi il faudra supprimer la Commission européenne. Le nombre de fonctionnaires européens, 36 000, peut être réduit. Ces derniers seront au service du conseil des chefs d'État et des ministres des 27 États membres. C'est là que devront se prendre les décisions puisque ce sont ces représentants des États nations qui sont légitimes. En parallèle, il faut revoir la composition du Parlement européen et revenir à un régime mixte: une partie des députés élus selon l'actuel mode des élections européennes et une autre partie désignée par les parlements nationaux. Ainsi il y aurait un meilleur ancrage des décisions prises au Parlement européen.

    Personne n'est obligé de rester dans l'UE. Mais il faut proposer une Europe à la carte. Certains États pourraient décider des coopérations plus approfondies s'ils le souhaitent, sur de multiples sujets, notamment l'industrie. Airbus est au départ une coopération limitée à quatre États. Un projet industriel sur le traitement des données, le Big data, et une coopération renforcée sur l'énergie pourraient être menés à bien.

    N'oublions pas que les Britanniques pourront aussi participer ponctuellement à des coopérations, notamment dans le domaine de la défense. Quid d'une politique de sécurité et de défense commune? Cela implique une prise de conscience des rapports de force dans le XXIe siècle, qui marque l'avènement d'un nouveau monde multipolaire et multiculturel. Il faut que l'Europe arrête de s'en remettre aux États-Unis pour sa défense.

    Vous évoquez la possibilité d'une Europe de la Défense. Pourtant, dans l'état actuel des choses, l'article 42 du Traité de l'Union européenne subordonne la Politique européenne de sécurité et de défense à l'OTAN. Une politique de défense européenne indépendante est-elle envisageable et crédible?

    La France a commis l'erreur de revenir dans le commandement intégré de l'OTAN et il est impératif de repenser les rapports de notre pays avec cette organisation militaire. Cela passera par l'augmentation des budgets de la défense - ce que demandent d'ailleurs les Etats-Unis, car cela les arrange de payer moins tant que ces États sont dans l'OTAN. Il faut instaurer une préférence communautaire pour les achats de matériels militaires, et ne plus systématiquement acheter américain. Je trouve à cet égard intéréssante , la proposition de Thierry Breton de créer un fonds d'investissement pour la Défense au sein de la zone euro. Il serait. alimenté par des emprunts de très longue durée et servirait à financer une part des systémes de défense communautarisés ( gardes-frontières, lutte contre le terrorisme etc.. ) et l'acquisition de matériels européens. Chaque Etat gardant bien sur la souveraineté sur la majeure partie de son budget de défense. Et pour la France bien sur la souveraineté sur sa force de frappe. La France doit en tout cas montrer l'exemple et augmenter régulièrement son budget de la Défense, en passant d'un peu plus de 1,5 % à 2,5% du PIB. Des coopérations renforcées par zones sont à organiser. Tous les États de l'UE n'ont pas les mêmes intérêts. Par exemple, les intérêts de la France se situent d'abord dans le bassin méditerranéen, au niveau de l'Italie, de la péninsule ibérique et de la Grèce, et de l'Afrique du Nord. Les priorités géostratégiques des pays baltes et de la Pologne se trouvent au niveau de la frontière russe. Or, notre intérêt n'est pas de se laisser entraîner dans une guerre froide, voire chaude, contre la Russie qui, fait partie de l'Europe.

    Quel impact aura le Brexit sur les négociations autour du traité transatlantique?

    Pour les Américains, le Brexit est une mauvaise affaire. Les Anglais étaient des partenaires de poids pour le traité de libre-échange transatlantique. Ils perdent un allié dans ces négociations. Aux États-Unis, Donald Trump militait contre ces accords, et Hillary Clinton, après les avoir préparés du temps où elle était secrétaire d'État de Barack Obama, y est à présent défavorable. En réalité, ces accords font le jeu des multinationales, essentiellement américaines, à ne pas confondre avec le peuple américain. Comment réguler les multinationales, voilà l'enjeu actuel. Je vois avec plaisir que la classe politique française a enfin pris conscience qu'en l'état actuel des négociations et des rapports de force, cet accord serait un marché de dupes pour les Européens et encore plus pour les Français.

    Plusieurs candidats à la primaire de la droite (Nicolas Sarkozy, Bruno Le Maire) ont formulé des propositions de référendum sur un nouveau traité européen. Un référendum dont la question porterait sur l'appartenance de la France à l'UE permettrait-il de clarifier le rapport que les Français entretiennent à une construction européenne qui semble en panne depuis le non massif au référendum de 2005?

    La France, contrairement au Royaume-Uni, est un pilier de l'UE. L'idée européenne est au départ américaine. Jean Monnet, l'un des pères fondateurs de la construction européenne, était un banquier davantage américain que français. La construction d'une Europe unifiée a été pensée dans le but de faire un marché unifié qui pèse face à l'URSS. Après la chute de l'Union soviétique, on a assisté à une montée en puissance du modèle néo-libéral, le marché s'est ouvert à tous les vents et l'UE est devenue une filiale des Etats-Unis. Si vous faites un référendum aujourd'hui, dans la plupart des pays, le non ou plutôt la sortie, aurait de grandes chances de l'emporter. Or, les peuples européens, et certainement les Français, ne sont pas contre le principe d'une Union. Ils sont contre la manière dont on a bâti cette union depuis un quart de siècle. Ce qui n'est pas la même chose. Ils ne sont pas contre la libre circulation des marchandises et même des personnes. Mais ils ne veulent pas une course au moins-disant fiscal et social. Ils veulent à la fois plus de liberté et ne plus être soumis à des bureaucraties tatillonnes et incompréhensibles et en même temps ils souhaitent être protégés. Contre les aléas de la vie, et c'est la responsabilité des systèmes de protection sociale, et contre les agressions d'où qu'elles viennent. C'est parce qu'elles ne répondaient pas à cette double exigence que l'UE et les institutions européennes ont failli et que les peuples, à commencer par les Britanniques, votent contre elles.

    Quels sont les écueils qui menacent l'UE?

    Le danger serait que nous basculions dans ce modèle californien que l'on voit poindre, ce capitalisme numérique, prolongement en quelque sorte de ce capitalisme financier qui a fait les dégâts que l'on connaît. Un modèle où l'hyper-individualisme est la règle. Où les États démocratiques laissent peu à peu le pouvoir à de nouvelles institutions, comme les multinationales, les innombrables organisations (FMI, banques centrales, comité de Bâle, banques centrales), les fondations des milliardaires, les ONG qui n'ont ni légitimité démocratique, ni comptes à rendre. Ce bouleversement technologique sans régulation, risque de nous conduire à une ubérisation du monde. Dans ce type de révolution technologique se mêlent le pire et le meilleur. À nous d'éviter que le pire ne prenne le dessus.

    Cette révolution numérique, ce basculement dans l'iconomie, nous ne devons pas la subir, sinon nous verrons une montée encore plus grande des inégalités. Au risque de déboucher sur un monde où il y aura, d'un côté les hyper productifs et les sachant, et de l'autre une masse - qui ne sera même plus concurrencée par les migrants, mais par les robots. Une masse à qui on allouera une sorte de revenu minimum. De quoi survivre et consommer… un peu. Voilà le risque. Voilà pourquoi il faut absolument réinventer un modèle de croissance. Comment? En commençant par établir avec ces nouveaux pouvoirs, qui tendent à la monopolisation, de nouveaux rapports de force, de nouvelles relations, afin d'éviter que ne se généralise le dumping fiscal, social, environnemental. C'est là où l'Europe retrouve tout son sens. Encore faut-il que les représentants des peuples européens aient une claire vision des enjeux et soient relativement insensibles au lobbying de ces nouvelles puissances. La France ne peut pas négocier toute seule avec Google ou sur des thématiques comme l'évasion fiscale.

    Est-il possible de réformer l'UE de l'intérieur?

    Nous devons avoir une vision claire de ce qu'on veut pour l'Europe. Organisons un mouvement pour l'indépendance de l'Europe, selon nos valeurs, nos intérêts communs, stratégiques et commerciaux, sans s'aligner systématiquement sur les États-Unis. Ou plutôt sur les intérêts du big business. Je constate qu'aux États-Unis, la révolte des classes moyennes s'est concrétisée aux primaires par les votes pour Bernie Sanders et surtout Donald Trump. Là aussi, le message est clair: les classes moyennes veulent reprendre en mains leur destin. Elles ne sont pas contre l'économie de marché, bien au contraire, mais elles veulent à la fois des règles du jeu non faussées, une concurrence loyale et plus de protection.

    Jean-Michel Quatrepoint, propos recueillis par Eléonore de Vulpillières (Figaro Vox, 8 juillet 2016)

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  • La revue de presse d'un esprit libre... (17)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Avec, pour la dernière de la saison, au sommaire :

    • Baisse du QI moyen en Europe, une information bien référencée qui ne semble pas inquiéter outre mesure nos gouvernants qui continuent de célébrer la "diversité" et d'exiger de leurs populations qu'elles accroissent leur "compétitivité". Concernant le fait que la présence des immigrés en France freine la productivité, se reporter au livre de Christopher Caldwell, Une révolution sous nos yeux, éditions du Toucan, 2011, page 75.
     
     
    • En 2015, et pour la première fois, la population de l'Union européenne a décru malgré l'installation d'au moins 1,9 millions de migrants d'origine non européenne. Ce qui ne dissuade nullement les ONG "humanitaires" de conspuer une "forteresse Europe" qui se fermerait à la "diversité" pour se murer dans le repli sur soi.
     
     
    Natacha Polony, la police de la pensée et le journalisme en laisse. 
     
     
    • Le copinage valeur plus forte que la vertu ? C'est la question que pose l'OJIM après la réintégration de la délicate Agnès Saal au ministère de la culture.
     
     
    Hervé Juvin en libertés, semaine du 27 juin au 1 juillet. L'économiste répond aux questions des téléspectateurs de Tv-Libertés et ses répliques sont percutantes. Le retour du drapeau bleu, blanc, rouge dans les stades / Faut-il accepter les prélèvements automatiques / L'un des arguments du Brexit c'est l'irréversibilité de la construction européenne. Info ou intox ? / Que sont les taux d'intérêt négatifs ?
     
     
    • Selon Bernard Lugan l'Afrique du Nord est dans une phase d'implosion, d'explosion et de perdition (entretien avec Boulevard Voltaire, première référence). En se reportant à son blog on pourra lire ce qu'il écrit de la situation en Libye à la date du 3 juillet (seconde référence). Bernard Lugan vient par ailleurs de faire paraitre un copieux ouvrage consacré à l'histoire de l'Afrique du Nord aux éditions du Rocher et fait l'objet à ce propos d'une interview dans le dernier numéro de la Nouvelle Revue d'Histoire.
     
     
     
    • La diplomatie française au Moyen-Orient par Bruno Guigue. À partir de son expérience personnelle, et de ses propres déconvenues, l'ancien diplomate livre sa pensée sur ce qu'était la politique arabe de la France. Une politique aujourd'hui défunte à force d'erreurs de jugement et de suivisme par rapport aux seuls intérêts israélo-américains dans une région où nous jouons désormais les utilités.
     
     
    • Sur le Moyen-Orient et sa situation géopolitique complexe la polémologue Caroline Galactéros répond aux questions de Charlotte Amadis et de Daoud Boughezala sur le site de Causeur.
     
     
    Michel Drac présente une remarquable analyse du capitalisme néolibéral mondialisé. Celui-ci bute en effet sur des limites technologiques et environnementales qui font apparaitre tout retour de la croissance comme un fable racontée à des enfants. Les oligarchies occidentales, sur la défensive, sont passées dans ces conditions d'une politique de la carotte (redistribution équitable de la plus value entre le capital et le travail) à celle du bâton (prédation financière et casse sociale) dont le terrain privilégié semble bien être l'Europe, ventre mou de la scène mondiale. La présente intervention se situe dans le droit fil de son dernier ouvrage Triangulation, repères pour des temps incertains paru en octobre 2015 aux éditions Le retour aux sources.
     
     
    • Dans une magnifique série de dix émissions (une heure chacune) consacrées à l'histoire, Régis Debray donne toute la mesure de son talent. Si il fallait faire une sélection parmi ces chroniques étincelantes notre choix se porterait sur l'histoire de la construction européenne et aussi sur celle ayant trait au sacré et à ses avatars.
     
     
    Jérôme Leroy, rédacteur en chef du pôle culture de Causeur expliquait avant que le match n'ait lieu les raisons pour lesquelles il souhaitait la victoire de l'Islande sur la France.
     
     
    Éric Zemmour ironise sur cette gauche qui aime les perdants magnifiques, qui préfère Poulidor et déteste Anquetil, qui célèbre Michel Rocard comme elle adule Pierre Mendès France mais porte le florentin Mitterrand au pouvoir pour réaliser le programme de Terra Nova que véhiculait la deuxième gauche incarnée par Rocard, un idiot utile en quelques sortes dont Alain Finkielkraut juge qu'il est resté prisonnier d'un vision trop étroitement économique du monde. Cependant la pratique politique de cet esprit  brillant et torturé plus marquée par les échecs que par les succès ne manquait pas d'une certaine noblesse; mais peut-on être un politique accompli quand on manque à ce point de cynisme ? 
     
     

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    A propos du Brexit
     
    • Réaction d'Alain de Benoist, après le Brexit. Le Royaume uni s'est toujours senti plus proche des États-Unis (le "grand large") que de l'Europe, où il n'a cessé de jouer le rôle d'un cheval de Troie atlantiste et dont il n'a jamais pleinement accepté les règles. En ce sens, le divorce met fin à un mariage qui n'avait jamais été vraiment consommé.
     
     
    • Pour Hubert Védrine l'Union européenne devenue une énorme machine à normaliser s'est égarée dans un océan de règles ubuesques. Afin de répondre au décrochage généralisé que les peuples lui opposent il propose que l'on arrête de se faire peur avec le mythe du retour nauséabond des années 30, et l'adjonction dans le processus d'une véritable subsidiarité faisant toute sa place au maintien des nations souveraines et à l'identité des peuples. Constatant que depuis Lisbonne, rejeté par referendum mais ratifié par le Parlement on n'est plus dans la démocratie, il se lamente de la cécité d'élites qui ne veulent jamais se remettre en cause ce qui est la principale raison de la montée des populismes et propose d'user du choc du Brexit pour repenser l'Union européenne en profondeur.
     
    • Pour Jean-Michel Quatrepoint, le Brexit révèle la défaite de l'idéologie néolibérale de Reagan et de Thatcher. Si l'Europe prend son indépendance vie à vis des États-Unis, elle pourra exister comme puissance par la coopération des nations qui la constituent.
     
     
    Éric Zemmour réagit au vote des Britanniques en faveur du Brexit et aux réactions qu'il a suscité. De l'ironie bien sûr et beaucoup de réalisme.
     
    • Dans son émission I-média du premier juillet (Tv-Libertés) Jean-Yves Le Gallou se consacre pour l'essentiel au traitement médiatique du Brexit qui a donné aux journalistes une remarquable occasion de faire la preuve de leur sectarisme (première référence). Dans le numéro du 8 juillet Jean-Yves Le Gallou se penche sur le conférence de le rentrée de France Télévision. Décryptage d'I-Média. Le Brexit encore où l'émission souligne avec ironie que les "élites" doivent se soulever contre les masses ignorantes et teigneuses; mais cela fait plus de 20 ans que Christopher Lasch avait analysé ce phénomène symptomatique de notre époque dans La révolte des élites et la trahison de la démocratie éditions Flammarion pour l'édition française de 1996 (seconde référence).
     
     
     
    Clément Sirdey se moque bien quant à lui des diatribes nostradmesques des éditocrates européistes annonçant les sept plaies d'Égypte pour la Grande Bretagne après sa sortie de l'Union. Il rappelle cette forte parole de Jean-Claude Juncker destinée à s'inscrire dans le bêtisier de l'arrogance : "il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européen".
     
     
    • Sombrant dans les ténèbres de l'obscurantisme le peuple britannique a opposé un non catégorique à son maintien dans l'Union européenne. C'est du moins l'interprétation que donne, parmi bien d'autres, un homme de l'élite éclairée qui sait par définition ce qu'est l'intérêt du peuple dans son blog de L'ExpressMathieu Bock-Côté répond aux propos hyperboliques de BHL dans une tribune bienvenue du Figaro. Titre de sa chronique "Le peuple contre les despotes éclairés".
     
     
    • Un tout autre son de cloche avec sa suffisance Bernard-Henri Botul. Après avoir pronostiqué la défaite du Brexit, il écrit dans sa revue La règle du jeu : "Assez de ces relents nationalistes rances, assez de ces peuples qui dressent des murs avec leurs voisins, soyons modernes, irréprochables, inspirons nous du génie du judaïsme et prenons exemple sur Israël, phare des nations". Il est évident, sauf pour les demeurés, que "le phare des nations" ne dresse aucun mur pour se séparer de ses voisins. BHL serait-il adepte du double discours ? 
     
     
    • L'intellectuel britannique Phillip Blond donne son avis circonstancié sur le Brexit dans un intéressant entretien accordé au Figaro. Théoricien du Red Toryism il dresse un diagnostic sans appel de la situation en Occident et déclare : "Le vote en faveur du brexit exprime le plus grand rejet de la mondialisation qu'ait connu dans les urnes le monde occidental. Les bénéficiaires de la mondialisation, tous ceux qui culturellement comme financièrement se trouvent en phase avec le nouvel ordre du monde, sont désormais minoritaires dans la société".
     
     
    • Comment l'Union européenne a sacrifié en trente ans ses classes moyennes et sabordé son modèle social au bénéfice d'une minorité de privilégiés. Euthanasie en règle sur l'autel d'un libre-échangisme à l'échelle planétaire. Une analyse exemplaire de Véronique Nguyen, professeur affiliée à HEC, qui conclue qu'il n'est guère surprenant dans ces conditions que ces catégories lésées expriment leur colère et leur frustration par des votes iconoclastes qui laissent les élites médusées. 
     
     
    • Le FN principal gagnant du Brexit ? Bonne analyse.
     
     
    • Selon Bruno Mégret le Brexit ne changera pas la donne au Royaume Uni. Il considère cette sortie comme un symptôme et non comme un remède de la maladie bruxelloise. Si il se refuse à l'Union européenne telle qu'elle se trouve configurée aujourd'hui, il est partisan de la conserver à condition de la transformer en une machinerie de puissance se préoccupant de l'identité de ses peuples en mettant fin à l'immigration et en organisant la remigration, ce que le départ de la Grande-Bretagne pourrait rendre possible puisqu'elle a toujours voulu une Europe de l'atlantisme et du libre-échange.
     
     
    Jean-luc Mélenchon, en pleine forme à propos du Brexit, déclare au Parlement européen le 5 juillet que l'Union européenne, "soit on la change, soit on la quitte".
     
     
    • Devant une UE qui s'effiloche Jacques Sapir s'applique à penser l'avenir des nations européennes.
     
     
     
    • Les séides de l'oligarchie qui siègent à la Commission européenne n'ont pas de souci à se faire. Après le Brexit ils pourront toujours se recaser chez Goldman Sachs à l'image de leur ancien patron José Manuel Barroso dont le parcours, depuis qu'il dirigeait le mouvement maoïstes portugais, se révèle exemplaire. Du col Mao au Rotary il n'y a qu'un pas, et beaucoup de reptations couronnées par ce bâton de maréchal qui sonne comme l'aveu de services rendus (première référence). Comme le note très justement Michel Onfray dans sa dernière chronique mensuelle, ne pèse sur Barroso et ses semblables  aucune fatwa. C'est la grande différence avec Alain de Benoist (seconde référence). Suit la pluie de critiques politiciennes qui a suivi cette annonce de la banque. Elle permet de mesurer la duplicité de la plupart de nos dirigeants (troisième référence). Enfin le jugement de Maxime Tandonnet selon qui ce parachutage bardé d'or ne peut que renforcer les soupçons de l'Europe d'en bas vis à vis des connivences de l'Europe d'en haut avec "la finance mondiale" et ainsi favoriser le "populisme" en vérifiant un de ses principaux arguments (quatrième référence).
     
     
     
     
     
     
    • Démocratie ? Les curieuses conceptions que s'en fait "l'expert" François Jost, chroniqueur de L'Obs, ou quand le galimatias rhétorique ne parvient qu'à démontrer l'inanité d'un discours emberlificoté plaidant pour une démocratie sublimée qui se passerait des électeurs.
     
     
    • Certains authentiques "démocrates" semblent partisans d'une euthanasie des vieux électeurs britanniques. Leur remarques désobligeantes montrent l'indigence de leur raisonnement. En effet ces commentateurs ne semblent pas se rendre compte qu'en France comme en Autriche ce sont les électeurs sénescents qui constituent l'obstacle principal à la victoire du "populisme" ? Ci-joint un article de Richard Dessens pour Euro-Libertés.
     
     

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    • Analyse du récent ouvrage d'Alexandre Latsa Un printemps russe (Édition des Syrtes) par Bernard Mazin sur Polémia (première référence). Alexandre Latsa s'entretient avec Jean-Michel Vernochet sur le printemps russe et la diabolisation de Poutine et de la Russie par les médias (seconde référence). Enfin il répond aux questions de Télé-Libertés (troisième référence).
     
     
     
     
     
    Paul Moreira, candide journaliste d'investigation qui s'était rendu célèbre par son documentaire non conforme intitulé Ukraine. Les masques de la révolution diffusé en février dernier sur Canal +  explique comment la perception d'un événement est filtrée par les médias censeurs. Il met en cause dans cet interview le manichéisme des grands organes de presse occidentaux en accord avec les manipulations du département d'État américain et des néo-cons. Ceux-ci agitant pour leurs basses oeuvres les milices nationalistes ukrainiennes avec la complicité active de l'Union européenne.
     
     
    • S'interrogant sur l'épistémé de la post-modernité occidentale le penseur croate Jure Georges Vujic note que la rétrospective loin d'être une simple mode est devenue une stratégie de marché du capitalisme tardif qui récupère et commercialise les idées, les mythologies, les produits de la "subversion" et la contre-culture libertaire de gauche dans un recyclage sans fin du vintage. Brillant développement sur le pastiche et l'histoire comme marchandise.
     
     
    • Conflits numéro 10 vient de paraitre (juillet-septembre). Éditorial de Pascal Gauchon. Au sommaire, les enjeux du sport, entretien avec Pascal Boniface, portrait de Lavrov par Frédéric Pons, le retour de l'armée russe, la grande stratégie de Frédéric II
     
     
    • Belle et brillante critique du dernier livre d'entretiens donnés par Rémi Brague, Où va l'histoire par Pierre Le Vigan. Rémi Brague est philosophe de profession spécialisé dans la philosophie chrétienne et musulmane de l'époque médiévale.
     
     
    • Critique laudative du Putain de Saint Foucault  de François Bousquet par Thierry Durolle sur le site d'Europe Maxima.
     
     
    François Bousquet rédacteur en chef adjoint de la revue Éléments s'entretient avec la rédaction de Rébellion sur le cas de Jean-Edern Hallier.
     
    • Le grand malaise des agriculteurs français lancés dans une course à la modernisation sous peine de mort rapide. Étranglé par les normes toujours plus complexes, toujours plus contraignants ils sont forcés à définir leur voisins comme des ennemis illustrant ainsi la doctrine libérale de la guerre de tous contre tous.
     
     
    • Éditorial du nouveau numéro de la la Nouvelle Revue d'Histoire (juillet-août 2016) par Philippe Conrad, son directeur, et sommaire.
     
     
    • L'entretien avec Jean Haudry publié dans la Nouvelle Revue d'Histoire (hors-série numéro 11) est désormais disponible sur le site de l'Institut Iliade. Il s'agit d'une critique du livre négationniste de l'archéologue Jean-Paul Demoule intitulé Où sont passés les Indo-européens ?
     
     
    • Le site theatrum belli publie un texte d'Alain de Benoist consacré aux héros et aux "péchés du guerrier" dans la tradition indo-européenne.
     
     
    • Les conséquences de l'ethnocide des Amérindiens au Canada.
     
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  • La revue de presse d'un esprit libre... (16)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Au sommaire :

    A propos du Brexit

    • Envieux de la chance qui est donnée au peuple britannique de pouvoir se prononcer démocratiquement sur son retrait de la technostructure de l'Union européenne, privilège qui n'est accordé à aucun autre peuple européen, le Groupe Plessis derrière lequel se dissimulent de hauts fonctionnaires en activité aborde dans cet article le rôle néfaste et hélas grandissant que joue la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH). Ses "arrêts de règlement" s'apparentent à de véritables diktats politiques nous dit Plessis qui pointe justement une démesure juridique à l'oeuvre contre la véritable légitimité politique qui ne saurait être définie que par des élus du peuple, garants de l'intérêt collectif. Le groupe propose en conséquence de s'évader de ce véritable carcan.
     
    Nicolas Gauthier traitait brièvement du Brexit avant que l'on en connaisse le résultat. Selon lui que cela passe ou que cela casse, l'issue devrait être à peu près la même.
     
     
    • Après la victoire du Brexit Alain Finkielkraut ne partage pas la tristesse mêlée de colère de Martin Schulz et de Jean-Claude Juncker et se réjouit même de les voir si déconfits, car selon lui les eurocrates ne l'ont pas volée tant ils se sont acharnés à faire de l'Union européenne le cheval de Troie de la déseuropéinisation. Une nouvelle lutte des classes s'instaure opposant les planétaires et les sédentaires, les globaux et les locaux, les hors-sol et les autochtones. Les planétaires sont non seulement mieux lotis économiquement mais ils se croient politiquement et moralement supérieurs et traitent les autochtones de ploucs, voire de salauds xénophobes. Lumineux !
     
     
    Mathieu Bock-Côté réagissant après que le référendum n'ait pas donné le résultat escompté par la plupart des élites s'amuse à noter les différents arguments d'explication donnés par le système médiatico-politique pour expliquer sa défaite. Ce système reproche par exemple à la procédure référendaire de "politiser la politique" (un comble) et d'avoir permis l'intrusion dans la consultation du problème de l'immigration massive. Cette disqualification du référendum va de pair avec la disqualification du peuple "immature" (sauf quand il se range à ce qu'a décidé l'oligarchie) qui ne serait pas habilité à se prononcer sur des questions aussi complexes tant il aspire, par nature, à se soustraire au "cercle de la raison" et à laisser parler ses plus viles passions. Pour remédier à cette hétérotélie de la démocratie et se débarrasser du peuple, ne faut-il pas passer de la souveraineté populaire au gouvernement des juges au nom du parachèvement sublime de la démocratie ?
     
     
    Elisabeth Lévy tire un premier bilan de la victoire du Brexit. Elle y voit avant tout un succès du peuple britannique contre "les gens convenables", les éditocrates, les sachants et les experts qui au nom d'une démocratie divine réduisent la volonté du peuple à un ramassis de pulsions xénophobes et de passions frileuses, évidemment "populistes" et par voie de conséquence "nauséabondes".
     
     
    • Même type de réaction de la part de Jean-Paul Brighelli qui fustige l'Europe des banques et des marchés et plaide pour une Europe politique de la culture. Un peuple préférerait-il son identité à la promesse mythique d'un accroissement du taux de croissance ?
     
     
    • Pour Jean-Michel Quatrepoint les populations sentent bien que le véritable pouvoir a déserté le monde politique qui continue de jouer son théâtre d'ombre tandis que que les multinationales et l'industrie financière imposent leur marque au monde qui vient. C'est la raison essentielle du vote britannique. Puis l'auteur trace à grandes enjambés ce que pourrait être une refondation de l'Europe avec pour thème dominant son autonomie de décision.
     
     
    Éric Dupin note qu'en France les défenseurs de l'Union européenne sont sur la défensive et que par réaction pavlovienne la plupart d'entre eux préconisent de riposter au départ britannique par une accélération de l'intégration européenne ! Sans convaincre grand monde. Leur démarche rappelle celle des moscoutaires qui expliquaient les déboires de leur système par une insuffisance d'économie administrée. Pour lui, il est évident que notre singularité nationale va à nouveau devoir s'exprimer.
     
     
    • Pour Jean-Luc Gréau, économiste, ancien expert du MEDEF, les Anglais viennent de rebattre les cartes politiques en Europe et d'ouvrir le champ des possibles jusqu'ici circonscrit par les agendas et les feuilles de route de la bureaucratie dirigeante. Bonne analyse des effets pervers de l'Union européenne sur le plan économique. D'autre part il s'en prend vivement à Hollande er à Sarkozy pour les fautes grossières qu'ils ont commises.
     
    Dominique Jamet qui sait parfaitement que l'accusation de "populisme" constitue la dernière ligne de défense des "élites" hors-sol et déconnectées du réel adresse une lettre ouverte aux petits marquis qui nous gouvernent sur le site de Debout la France. Charge vibrante contre l'oligarchie.
     
     
    • Pour Gabriel Robin, animateur du Collectif Culture et Libertés du Rassemblement Bleu Marine, l'Union européenne, entité post-politique et post-historique qui absorbe la plupart des fonctions naguère dévolues aux États sans assurer la moindre protection des peuples, est désormais en sursis. Une certaine Europe est sans doute en déroute, celle du comité central des élites mondialisées dont les dégoisements sont de moins en moins audibles. Cette débandade fera-t-elle surgir des décombres un autre projet européen, telle est la question.
     
     
    • Selon Gil Mihaely, directeur de Causeur, la Grande Bretagne nous a non seulement donné une leçon de démocratie mais plus encore elle a voulu imposer la réaffirmation de son existence en tant que corps politique. Ce corps politique était dépossédé, nous dit-il, de la maîtrise de son destin commun au profit de considération économique, qu'en revanche les partisans du vote "remain" ne manquaient pas de mettre en avant, agitant les épouvantails de toutes sortes en cas de sortie de l'UE. Ne nous cachons pas cependant les ambigüités de ce vote pour le Brexit qui a été pour une part celui de néo-libéraux pur sucre plus attirés par "le grand large" que par une soumission aux normes écologiques et règlementaires de l'Union, aussi insuffisantes soient-elles.
     
    • Intéressante observation de Gérard Dussouy qui relève que le Royaume-Uni aura bien été en Europe le cheval de Troie américain que le général de Gaulle redoutait et que ses quatre décennies de présence au sein des institutions auront encouragé le marché commun, qui supposait une préférence communautaire, à devenir une simple zone de libre échange travaillée par le moraline et ouverte à tous les vents du large. Quant au Royaume-Uni sa souveraineté reconquise ne risque-t-elle pas d'être une victoire à la Pyrrhus ? En effet, parmi mille exemples, ce n'est pas l'Union européenne qui a octroyé d'office la nationalité britannique à tous les ressortissants du Commonwealth et d'éventuelles mesures anti-immigration ne les toucheront pas tandis qu'elles viseront les nombreux Européens installés outre-Manche. De quoi refroidir l'euphorie "nationaliste" qui s'installe chez ses voisins.
     
     
    • Toujours à propos du Brexit, l'avis de Philippe Milliau, président du groupe Libertés (TV-Libertés, Radio-Libertés, Euro-Libertés) pour qui la Grande Bretagne s'expulsant de la construction européenne fournit l'opportunité de bâtir enfin une maison commune identitaire associant les États dans un projet de puissance indépendante disposée à jouer son rôle au sein du monde multipolaire.
     

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    • Le rendez-vous de "la droite hors des murs" de Béziers  provoque une réjouissante charge de l'Observatoire des Journaliste et de l'Information Médiatique à l'encontre de la presse alignée et de la manière dont elle a rendu compte de cet événement. Passant en revue nombre d'articles, d'informations radio et de séquences télévisuelles où la délation perce sous l'inquisition, le journaliste anonyme qui s'est livré à cette synthèse ne manque assurément pas d'esprit.
     
     
    Jean-Louis Harouel, professeur agrégé de droit, vient de publier un excellent essai Les droits de l'homme contre le peuple (Éditions Desclée de Brouwer). Interrogé à ce sujet par Figaro-vox, il ne mâche pas ses mots, précisant que tant que nous confondrons les droits de l'homme abstrait et de nulle part (human right) avec les libertés publiques (right of man) nous nous condamnons à révoquer toute discrimination, et plus précisément la discrimination fondatrice de nos sociétés démocratiques qui traite différemment le citoyen et le non citoyen, le national et l'étranger. Les droits de l'homme devenus depuis quelques décennies une nouvelle religion séculière détruisent au nom du Bien les assises de nos nations en récusant nos droits collectifs et notre souveraineté. Avec l'ouvrage d'Alain de Benoist Au delà des droits de l'homme. Pour défendre les libertés (Éditions Pierre-Guillaume de Roux), ce livre constitue la base de toute réflexion argumentée sur la société de marché cosmopolite qu'entendent nous imposer les oligarchies au pouvoir.  
     
     
    • Une bonne critique de l'essai de Jean-Louis Harouel par Joël Prieur paru sur le site de Polémia. L'auteur voit essentiellement à travers ce que sont devenus les droits de l'homme une machine à chloroformer le peuple.
     
     
    • "Il n'y a que la droite la plus ringarde pour croire que les journalistes sont des gaucho-communistes ou d'affreux trotskistes. L'immense majorité d'entre eux adhérent en fait à la vulgate libérale-libertaire, ce mélange d'idéologie des droits de l'homme, d'antiracisme de convenance, de progressisme niais, de révérence au marché et de politiquement correct". Aussi" ne sont-ils pas les victimes de la censure mais ses vecteurs", déclare Alain de Benoist dans une de ses dernières chronique sur Boulevard Voltaire (première référence). Dans une seconde chronique (deuxième référence) il définit la culture comme un habitus, à la manière de l'anthropologie culturelle, habitus que l'idéologie dominante s'efforce d'éradiquer. Répondant ensuite à la question de savoir si il existe une culture de "droite", il note que cette culture est clivée par deux anthropologies antagonistes; celle des "conservateurs" soucieux de l'héritage et celle des libéraux qui raisonnant en termes économiques pensent que la société repose sur la seule confrontation des intérêts égoïstes régulée par les mécanismes du marché et du contrat. Il conclue en soulignant l'impossibilité qu'il y a à se dire "conservateur-libéral" sans s'exposer au risque de l'incohérence.
     
     
     
    • Dans Le Nomos de la Terre paru en 1950, Carl Schmitt montre qu'il ne peut exister d'ordre sans enracinement. Contre la pensée positiviste et l'idéal cosmopolitique , il en appelle à la terre, substrat élémentaire pour comprendre le rapport de l'humanité au monde. Article de Valentin Fontan-Moret paru sur le site de Philitt.
     
     
    Mathieu Slama, essayiste qui vient de publier La guerre des mondes : réflexions sur la croisade idéologique de Poutine contre l'Occident, s'en prend ici au prétendu universalisme de l'Occident qui entend, avec arrogance, réduire la diversité du monde à un autre lui-même.
     
     
    • Deux articles de Caroline Galactéros. Le premier est consacré à l'imbroglio stratégique libyen en juin 2016 et aux péripéties qui l'ont précédé. Il s'y dévoile la forte influence qu'exercent les analyses de l'africaniste Bernard Lugan. Le second est relatif au bouclier antimissile de l'OTAN en Roumanie, où il est déjà opérationnel, et prochainement en Pologne. Ce dispositif dirigé contre la Russie entérine la fuite en avant des stratèges américains et surtout la domination complète de "la puissance indispensable" sur l'Europe. L'auteure explique parfaitement les enjeux qui se dissimulent derrière ce réarmement offensif.
     
     
     
    Hervé Juvin en libertés, semaine du 13 au 17 juin. L'essayiste y aborde avec son brio habituel 5 questions d'actualité. L'état d'urgence et les manifestations; les "réfugiés" disparaissent des écrans radar sans pour autant continuer d'affluer sur nos cotes avec le soutien empressé des ONG humanitaires; contradiction entre l'encyclique Laudato Si qui souligne les atteintes irréversibles à l'environnement qui se concluent par la disparition accélérée des espèces végétales et animales et le discours papal nous enjoignant d'accueillir sans limite les immigrés, ce qui à terme ne peut provoquer que la fin de la diversité humaine; la déclaration du président Erdogan affirmant que le contrôle des naissances est contraire à l'islam traduit le fossé grandissant entre les valeurs de l'Europe et celles de la Turquie; nous ne pouvons pas appliquer nos préférences collectives en matière écologique car celles-ci se heurtent à des intérêts industriels tout puissant or les élections autrichiennes viennent de porter à la tête du pays un président écologiste contre son challenger national-conservateur, c'est pourquoi le cours des événements dans ce pays devrait lever bien des ambigüités sur le type de souci environnemental qui s'y fera jour quand on sait que les Autrichiens sont si attachés à leur style de vie.
     
     
    • Brut de décoffrage, tel est le texte que le préfet honoraire de région Paul Bernard vient de livrer à la sagacité des lecteurs de Boulevard Voltaire. On peut s'interroger sur les recettes  à base de "y-a-qu'a" "faut- qu'on" qu'il propose quand bien même elles seraient des plus salutaires. Ce que l'on pourrait exiger d'un ex-serviteur de la machine administrative de l'État c'est de nous dire comment, par quels cheminements politiques on parvient aux mesures qu'il préconise ? Bref on demande un mode d'emploi sur des décisions que chacun s'accorde à trouver les meilleures. Force doit rester à la loi, dit-il. Mais est-ce les lois actuelles, celles qui justement nous ont précipité dans l'état où nous nous trouvons ?
     
     
    • Daoud Boughezala s'entretient avec Kleis Jager, correspondant à Paris du quotidien néerlandais Trouw au sujet de la déchéance de nationalité aux Pays-Bas. Il y est question des effets pervers qu'entraine le  
    succès du parti anti-islam de Geert Wilders.
     
     
    • L'éternel retour des "déséquilibrés" islamistes traité avec une ironie féroce par l'OJIM.
     
    • Orlando et Magnanville, les justes réflexions d'Alain Finkielkraut.
     
     
    • Passionnant débat sur le libéralisme et le multiculturalisme entre Charles Beigbeder (Les Républicains) et Thibault Isabel (rédacteur en chef de la revue Krisis). Enregistré par Sputnik France.
     
     
    • Le politologue Marco Tarchi, professeur à l'université de Florence et spécialiste du "populisme" jauge le parti antisystème de Beppe Grillo qui vient de remporter les municipalités de Turin et de Rome. Il est interviewé ici par Daoud Boughezala, rédacteur en chef de Causeur.
     
     
    • Les populistes gouverneront-ils un jour ? Telle est l'interrogation à laquelle tente de répondre Vincent Coussedière selon qui le terme de "populisme" recèle avant tout une facilité langagière. Ce mot-valise disqualifiant sert en effet à masquer la détresse des commentateurs devant l'hétérogénéité de ceux qu'ils désignent ainsi et à maintenir un système partisan obsolète et à bout de souffle afin de différer l'émergence de nouveaux clivages.
     
     
    • Le site Le Comptoir a dégoté deux penseurs québécois passionnants. L'un, Éric Martin est professeur de philosophie, l'autre Maxime Ouellet est professeur de sciences politiques. Se réclamant du courant "conservateur de gauche" ou, mieux, de la gauche du commun, ils cherchent à penser ensemble l'émancipation et l'enracinement en opposition à la gauche postmoderne, libérale et individualiste qui consent à ce que le marché devienne la seule forme du lien social. Une réflexion qui ouvre des pistes encore insoupçonnées. 
     
     
    • Déambulation de Jan Marejko à partir du livre d'Alain de Benoist Les Démons du bien. L'homme "pur" des droits de l'homme serait selon lui un "gnostique néo-adamite", un homme d'avant la chute, vivant dans le jardin d'Eden. Bonne réflexion sur le millénarisme occidental et ses avatars post-modernes.
     
     
    • "Faire des moustaches à Robespierre" par Morasse de Breizh-info. Sous son pseudonyme transparent ce chroniqueur à l'humour vachard s'en prend aux nouveaux sans-culottes qui entendent rebaptiser nos rues en les honorant du nom des terroristes vandales de l'an 1793.
     
     
    • La complainte "doloriste et réactionnaire" de Richard Millet.
     
     
     
    • La théorie du genre mise à l'épreuve. Un article du Point nous apprend que non seulement les hommes et les femmes sont biologiquement différents mais, horresco referens, qu'ils ne sont pas égaux devant la maladie. Cette redécouverte des enseignements d'Hippocrate (mâle, vieux et blanc) aurait de quoi donner une jaunisse à Edith Butler.
     
     
    • Extrait de Paideia, la formation de l'homme grec. Ouvrage ancien de Werner Jaeger qui garde toute sa force d'évocation. Ici un passage consacré à Sparte.
     
     
    • Sur le blog de Juan Asensio un article très intéressant intitulé Heidegger et Maurras à Athènes de Baptiste Rappin. Il s'agit d'une réflexion brillante sur deux penseurs des commencements. "La philosophie, écrit-il, ne fera en effet rien d'autre que passer la navette de la raison entre les chaînes et la trame de la tapisserie mythique - Maurras autant que Heidegger l'ont parfaitement saisi : héritière de l'Odyssée, elle se pratiquera sur le mode du va-et-vient, comme chez Plotin qui voit le monde alterner entre les mouvements de procession et de conversion; fille de l'Iliade, elle prendra la forme du Polémos chez Héraclite, et restera encore pour Kant un "champ de batailles". Le rationalisme ratiocineur et le logos logorrhéique étouffèrent de leur poids et de leur bêtise cette vérité native que la raison ne saurait à elle-même se donner sa propre fin, et qu'elle s'origine à tout jamais, qu'on le veuille ou nom, dans la puissance des symboles."                            
    À propos de Heidegger signalons que dans le dernier numéro de Commentaire (été 2016) se trouve un bel article de François Fédier qui est une réfutation de l'accusation par excellence portée contre le philosophe.
     
     
    • Dans un article paru sur Breizh-info, PLG animateur sur la radio Méridien zéro, opère la critique du récent et remarquable ouvrage de Mathieu Slama La guerre des mondes. Réflexion sur la croisade idéologique de Poutine contre l'Occident paru aux éditions de Fallois. Il y insiste sur les grammaires du monde antagonistes et irréconciliables qui opposent l'Europe actuelle au pôle russe qui rejette son universalisme sans frontières fonctionnant en syntagme avec un individualisme exacerbé. L'audience croissante que rencontre le discours poutinien en Europe s'expliquerait par le délitement du modèle occidental que l'on sent épuisé plus que par les réussites, néanmoins réelles, de la matrice russe. 
     
     
    • Sur son site Europe maxima Georges Feltin-Tracol propose une bonne critique du dernier ouvrage de Bruno Mégret, Le temps du phénix sorti en février aux Éditions Cité-Liberté.
     
     
    • Le social-démocrate Frank Walter Steimeier, ministre des Affaires étrangères de la République fédérale d'Allemagne, a déclaré à propos du déploiement d'unités militaires de l'OTAN en Pologne et dans les pays baltes : "Ce que nous devrions éviter aujourd'hui, c'est d'envenimer la situation avec des cris guerriers et des bruits de bottes". Ces propos annoncent-ils des évolutions capitales de la diplomatie allemande qui pour l'heure demeure l'élève modèle des États-Unis en Europe ?
     
     
    • Les usages inattendus du Coca-Cola, célèbre marque qui à elle seule résume l'impérialisme américain. On peut quasiment tout faire avec du Coca, sauf bien évidemment le boire.
     
     
    Jean-Paul Brighelli interroge Lydia Guirous, éphémère porte-parole des Républicains, virée pour cause de langue trop bien pendue et pas toujours conforme à la doxa. "Comme quoi on peut être (de culture) musulmane et ne pas dire d'énormités, résume l'alerte chroniqueur.
     
     
    • Un article des Non-Alignés étudie l'influence grandissante des réseaux conservateurs orthodoxes sur la politique russe.
     
     
    • Le Cercle Non Conforme met en ligne cet article (première référence); il s'agit d'une réflexion mesurée sur l'attentat d'Orlando et ses motivations anti-homoxexuelles. Les djihadistes confondent trop souvent la propagande LGTB que produit l'Occident avec la réalité de ses moeurs. Il faut rappeler ici que les conduites homosexuelles sont universelles et qu'elle concernent entre 3 et 5% des hommes selon les âges. le problème, si problème il , a, réside dans le fait qu'en Occident la police des braguettes tend à s'estomper alors que dans l'aire de la culture islamique le souci de la "pureté" condamne ces pratiques jusqu'à  condamner leurs auteurs à une mort infâme. Le CNC a produit deux autres analyses intéressantes, l'une sur le Brexit qui pose des questions capitales sur le fonctionnement de l'Union après la sortie du Royaume Uni (deuxième référence), l'autre sur la notion frelatée d'Occident (troisième référence).
     
     
     
     
    • Tout savoir sur Eugénie Bastié qui outre son génial prénom se présente comme le mousquetaire du courant "réactionnaire". Collaboratrice de Causeur, membre de la rédaction du Figaro, elle est aussi rédactrice en chef politique de la revue chrétienne d'écologie intégrale Limite. Son portrait est ici croqué par l'OJIM.
     
     
    • Fronde à Radio Courtoisie. Henry de Lesquenson président, est en effet contestée par certains directeurs d'émission et, plus grave, par nombre de cotisants à "la radio du pays réel et de la francophonie". Tout cela nous est racontée par l'OJIM. En effet depuis qu'il affiche sa prétention farfelue à se présenter aux prochaines présidentielles, Lesquen  multiplie, par tweets, les déclarations aussi incandescentes qu'ubuesques qui font de lui, en moins drôle, la réplique d'un Ferdinand Lop qui voudrait détruire la tour Eiffel. Peut-être pour cet ancien Horlogiste une manière de prendre de la hauteur. 
     
     
    • L'avocat François Teutsch revient sur le crise qui frappe Radio Courtoisie. Il craint qu'elle ne devienne Radio Lesquen avant de se voir retirer ses fréquences et regrette la belle aventure qui semble devoir prendre fin.
     
     
    Léa Salamé en bon petit soldat du journalisme new-look lancée à la poursuite de la bête immonde. Réjouissant.
     
     
    • Excellent entretien avec la philosophe Bérénice Levet qui constate que l'on ne forme plus à l'école des êtres capables de penser et de juger, mais des spécialistes de la solution des problèmes, de bons techniciens si possible compétitfs. Que l'individu y est réduit à un simple agent économique. L'immolation de la jeunesse sous prétexte de jeunisme, dit-elle, dure depuis les années Mitterrand/Lang et la réforme de Najat Vallaud-Belkacem n'en est que le parachèvement. L'école de la République rongée par un progressisme de pacotille ne fabrique plus de Français, regrette-t-elle.
     
     
    • Et pour finir, les Brigandes chantent "Jakadi des millions". Belle fable sur le show-biz immigrationniste qui a le coeur sur la main et des oursins dans les poches.
     
     
     

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  • Le Brexit ou la grande révolte des classes moyennes...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Michel Quatrepoint, cueilli sur le Figaro Vox et consacré aux leçons qui peuvent être tirées du vote en faveur du Brexit...

    Journaliste, Jean-Michel Quatrepoint a notamment publié Mourir pour le yuan (François Bourin, 2011), Le choc des empires (Gallimard, 2014) ou Alstom, scandale d'Etat (Fayard, 2015).

     

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    Le Brexit ou la grande révolte des classes moyennes

    Ils ont osé! Une fois de plus, les Britanniques nous donnent une leçon de démocratie. Et l'oligarchie montre son vrai visage. Voilà des années que les avertissements se sont multipliés. Aux quatre coins de l'Europe, comme aux Etats-Unis, les peuples sont mécontents de la manière dont ils sont gouvernés. Ils constatent la paupérisation des classes moyennes sous le double impact d'un capitalisme financier devenu fou et d'une révolution numérique sans garde-fous. Oui, les classes moyennes, piliers de nos démocraties occidentales aspirent à plus de sécurité, à plus de régulation. Elles ne se satisfont pas d'un retour aux lois de la jungle.

    C'est cela qu'elles expriment à travers leurs votes. Les «non» à répétition aux referendums, en France, aux Pays-Bas, au Danemark, dont on n'a pas tenu compte. La percée du Front national, du FPO en Autriche, les victoires des jeunes élus du mouvement de Beppe Grillo à Rome et à Turin. Les scores de Bernie Sanders face à une Hillary Clinton, symbole d'une oligarchie liée aux multinationales et à la finance. Le succès de Donald Trump chez les Républicains. Tout est lié. Et il ne sert à rien de pousser des cris d'orfraie contre les populistes, les souverainistes, les démagogues. La seule question qui compte est: pourquoi ont-ils le vente en poupe? Parce que les autres ont failli.

    Ils ont d'abord failli dans leur communication. À force de crier au loup, les électeurs ont dit «Chiche». À force de leur dire «il n'y a pas d'autre alternative», ils disent: «on va bien voir». Nul doute que les innombrables injonctions des organismes internationaux, des banquiers et de Barack Obama pour inviter les Britanniques à bien voter aura eu un effet contraire. Jusqu'à Emmanuel Macron qui s'est cru autorisé de menacer les Britanniques au cas où ils voteraient pour le Brexit. Ils ont failli parce que les peuples sentent bien que le pouvoir a peu a peu échappé aux politiques pour se concentrer dans les mains de multinationales n'ayant aucune légitimité démocratique.

    Et maintenant? Le calme va revenir peu à peu. Les marchés financiers, qui avaient spéculé sur un remain, ont été pris à contrepied. Croyant les bookmakers, ils avaient même racheté leurs positions vendeur. Dans ces marchés devenus de véritables casinos, il est donc logique que les mouvements soient amplifiés. On ne pleurera pas sur ceux qui ont spéculé. Les banques centrales vont faire la seule chose qu'elles savent désormais faire: injecter de la liquidité, rajouter de la dette à la dette pour éviter un embrasement généralisé.

    Les gens raisonnables vont prendre acte de la situation et organiser une sortie par étapes d'une Angleterre qui aura, n'en doutons pas, un statut particulier à l'avenir. Une sorte de membre associé, à l'image de la Suisse. La City va y laisser des plumes, mais ce n'est que justice. Le comble de cette construction européenne et de la création de l'euro ayant été d'en faire la capitale financière de la zone euro. La livre va dévaluer de fait. Ce qui reste de l'industrie britannique regagnera en compétitivité. Y compris vis-à-vis de l'Europe, car on ne voit pas les Européens appliquer des droits de douane exorbitants du jour au lendemain sur les produits britanniques.

    La seule question désormais qui vaille est celle de l'avenir de l'Union européenne. On entend de ci de là, les partisans du fédéralisme réclamer plus d'Europe. Ils se trompent. Le problème n'est pas de faire plus d'Europe, mais mieux d'Europe. L'heure n'est pas à bâtir une Europe fédérale, mais bel et bien de reconstruire une véritable confédération d'États nations. Avec de nouvelles institutions, notamment un Parlement où seraient mêlés députés européens élus et représentants des États. Avec une commission aux pouvoirs réduits au profit du conseil des chefs d'État et des conseils des ministres ad hoc. Reste que la seule question pour une future Europe est celle de ses rapports face à ces grands empires (Chine, Etats-Unis), à la Russie au monde arabo-musulman et à l'Afrique. Si l'on veut que l'Europe existe, qu'elle ait une ambition, elle doit redéfinir ses relations avec les États-Unis et ne plus se contenter d'en être une filiale plus ou moins obéissante. Il n'y aura pas d'Europe si Paris, Berlin et quelques autres capitales, ne comprennent pas que l'indépendance, est consubstantielle à un nouveau projet européen.

    Qui dit indépendance implique d'abord d'avoir une vraie politique de défense et d'y mettre les moyens qu'il faut. Comment peut-on espérer défendre nos intérêts, notamment économiques et culturels, si nous dépendons de Washington pour notre défense? L'Otan a vécu. Et il faut prendre, si jamais Trump est élu, le futur président au mot. Voilà ce qu'il faut mettre dans la balance avec Angela Merkel: elle doit choisir son camp.

    Qui dit indépendance, dit la fin des négociations sur les traités de libre-échange transatlantique. Cette négociation n'a plus de sens. D'abord, parce que les Britanniques ne sauraient y participer. Ensuite parce que la commission est décrédibilisée et qu'elle n'est plus légitime pour mener une négociation secrète et opaque.

    Qui dit indépendance, dit mise en place d'un minimum de règles fiscales et sociales communes, autour d'un petit noyau dur de pays. Plus question que les multinationales anglo-saxonnes et autres imposent leurs règles en matière d'optimisation fiscale ou de captation des données.

    Qui dit indépendance dit refus d'appliquer purement et simplement les normes juridiques anglo-saxonnes et d'accepter, sans aucune contrepartie, l'extraterritorialité du droit américain. Le chantier est immense. Encore faut-il mettre clairement les enjeux sur la table! Et si jamais nos partenaires, notamment nos amis allemands, ne partagent pas cette vision d'une Europe réellement indépendante, mieux vaudra alors pour notre pays, un bon divorce, plutôt qu'un mariage qui part à vau-l'eau.

    Jean-Michel Quatrepoint (Figaro Vox, 24 juin 2016)

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  • La revue de presse d'un esprit libre... (11)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Au sommaire :

    • Communication de Lionel Rondouin lors du récent colloque de l'Institut Iliade pour la longue mémoire. Lionel Rondouin est un ancien élève de l'École Normale Supérieure. Le colloque du 9 avril était consacré au réveil de la conscience européenne face au choc migratoire. 
     
    • Témoignage d'Adriano Scianca, l'un des leader de Casa Pound, diffusé lors du colloque Iliade. Suivie de celui de l'espagnol José Javier Esparza.
     
     
     
    • Table ronde du colloque de l'Iliade proposant diverses voies du militantisme identitaire, chacune d'entre elles étant représentée par son principal animateur. Le débat est dirigé par Patrick Péhèle de la revue Éléments.
     
     
    Alain de Benoist fait salle comble à Sciences-Po. Successivement, l'article du Monde où l'on notera que la qualification "d'extrême droite" suite à un repentir a disparu dans la version papier, puis une tribune parue sur Le Figaro de Laurent Cantamessi, co-animateur du site Idiocratie.
     
     
     
    Alain de Benoist sur Boulevard Voltaire fait la critique de l'idéal de transparence issu de la philosophie des Lumières et accessoire de la société de contrôle et de surveillance et plaide pour une certaine opacité des affaires publiques. Rappel : Éloge de l'ombre de Tanizaki où l'auteur japonais explique parfaitement comment l'Occident s'est mutilé avec sa hantise de tout mettre en lumière.
     
     
    Jean-Michel Quatrepoint à la Fondation Res Publica. Titre de son exposé : "États-Unis, une offensive judiciaire globale". Dans le cadre du colloque "L'extraterritorialité du droit américain, 1 février 2016. Comme 78% des transactions mondiales s'effectuent en dollar et transitent par les États-Unis les Américains disposent d'un moyen de chantage extraordinaire qui se révèle un business conséquent et, dans les secteurs stratégiques, du moyen d'asseoir leur domination.
     
     
    Kostas Mavrakis, collaborateur de la revue Krisis, revient dans Causeur sur le dernier opus de Michel Onfray paru chez Grasset Penser l'islam. Onfray s'est toujours opposé aux différents monothéismes dans lesquels il voit de fréquentes apologies de la violence et de la guerre. Citant de nombreuses sourates, confrontant les diverses interprétations, il place les musulmans devant la réalité du Coran qui fait la part belle à l'esprit de conquête, à la cruauté et à la misogynie. Mais se voulant équanime il croit devoir découvrir dans les Évangiles un semblable appel à la sainte violence, ce que conteste Mavrakis à raison. Plaidoyer d'un chrétien contre la barbarie et contre aussi certaines analyses de Michel Onfray certainement trop rapides.
     
     
     
    Vincent Coussedière dans une tribune à Causeur intitulée Les deux visages du somnambulisme politique français Nuit debout et primaires partout. Vincent Coussedière est l'auteur d'un essai intitulé Retour du peuple, An I paru au cerf en 2016.
     
     
    • Métamag publie une très intéressante chronique de Georges Maurice, professeur des facultés de droit, sur l'éthique de l'honneur versus la dignité des personnes.
     
     
    • Dans la dernière émission d'I-Média. A partir de la 15 ème minute Jean-Yves Le Gallou revient sur l'ahurissante condamnation de Boris Le Lay à deux ans de prison ferme pour avoir déclaré primitivement qu'il ne saurait y avoir de "Celtes noirs". Dans la logique des juges il est évident que des Bambaras Asiatiques ou des Inuits Blancs ne sont plus de l'ordre de la chimère, comme quoi l'idéologie antiraciste réalise bien des miracles...
     
     
    • Ci-dessous le blogueur Boris Le Lay répond à Breizh-infos, suite à sa condamnation dans un procès en sorcellerie. Sa liberté de ton résulte sans doute du fait qu'il s'exprime à partir du Japon, pays du matin calme, qui ne connait pas d'immigration ni de lois susceptibles de réduire au silence la grande majorité de ses nationaux.
     
     
    • Le plaidoyer (vidéo) de Boris Le Lay à la suite de sa condamnation. Il a l'habileté de ne pas donner dans le réquisitoire et de sourire d'une justice qui incite les djihadistes de retour de Syrie (des "ennemis" d'après Manuel Valls) à caresser des hamsters en les regardant droit dans les yeux et qui condamne à de la prison ferme des opposants de papier au gouvernement...
     
     
    Jean-Yves Le Gallou interviewé par Radio Brigandes fait un très bon exposé sur le système médiatique occidental de propagande. L'ensemble se termine par une nouvelle chanson des Brigandes : "Cerveau lavé". 
     
     
    • "Souveraineté ou identité ?" Le duel entre Jacques Sapir et Jean-Yves Le Gallou enregistré sur Radio Courtoisie fin mars (audio). Sapir vient de publier "Souveraineté, Démocratie, Laïcité" chez Michalon;  Le Gallou vient de publier "Immigration, la catastrophe. Que faire" chez Via romana
    https://www.youtube.com/watch?v=pgKiQ02v9Xs#t=2638
     
    Jean-Yves Le Gallou en discussion avec Gilbert Collard. Connivence feutrée dépourvue des chausse-trapes propres aux dérapages qui font le buzz.
     
     
    Jean-Yves Le Gallou dans un bref entretien avec Boulevard Voltaire à propos des rendez-vous de Béziers.
     
     
    • Les djihadistes sont-ils des cons ? La question ainsi posée par Frederic Saint Clair mériterait sans doute d'être étendue à un plus grand ensemble d'acteurs sociaux.
     
     
    • De Mathieu Bock-Côté, une tribune libre sur le nouveau clivage qu'il voit de dessiner entre conservateurs et progressistes. Est-il véritablement nouveau ?
     
     
    • À la suite de la parution du livre de Mathieu Bock-Côté Le muticulturalisme comme religion politique (Cerf), une critique de Laurent Gayard qui insiste sur l'essor à l'université des pensées déconstructionnistes qui ont permis le revival idéologique de l'extrême gauche qui fait de l'Autre la figure régénératrice de la civilisation occidentale. 
     
     
    • Pour George Bensoussan une partie des noctambules de Nuit debout se vivant dans un monde clivé entre un eux et un nous fantomatique, n'admet ni le compromis ni la contradiction, d'autant plus qu' ils placent dans cette dualité dans l'ordre de la morale, vertu contre vice, bien contre mal. Sa démonstration est entachée cependant par son sionisme militant.
     
     
    Jérome Godefroy, ancien journaliste de RTL habitant place de la République sur la mascarade  Nuit debout.
     
     
    • À la suite de l'intervention violente de certains apprentis robespierristes contre "l'ennemi du peuple" place de la République, Michel Onfray affiche dans Le Point sa solidarité avec Alain Finkielkraut et explique le rôle falsificateur des médias qui ont rendu compte de l'événement.
    • Le libertaire Michel Onfray remarque dans Le Figaro Magazine qu'il fut un temps, pas si lointain, où chacun en Europe pouvait discuter librement des religions. C'est encore vrai pour la majorité d'entre elles, sauf pour l'islam dont un "progressisme archaïsant" (et sévissant par la loi) a décrété que toute réflexion sur ses habitus relevait désormais du domaine réservé à la seule approbation. Étonnant  dans un pays, la France, dont la légitimité républicaine s'est construite sur la contestation de l'emprise catholique et dont la dérive présente pourrait s'assimiler à bon droit à une régression.
    Jean-Marc Jancovici qui vient de publier chez Odile Jacob Dormez tranquilles jusqu'en 2100 et autres malentendus sur le climat et l'énergie se livre dans deux entretiens. Avec la Société française d'énergie nucléaire tout d'abord où il trace un bilan de la Cop 21 et démonte le mythe d'une énergie 100% renouvelable. Et secondement dans une interview à France info avec Olivier de Lagarde le 26 04 2016 en trois épisodes de 4 minutes. Dans cet entretien il développe par exemple le lien entre le couple énergie-climat et les révolutions arabes de 2011. Décapant pour démontrer que ces "révolutions" ne devaient pas grand chose à l'idéal démocratique dont ce serait l'émanation si l'on en croit les médias de propagande.
     
     
     
    • Le Cercle Henri Lagrange invite Christian Harbulot à parler de la guerre économique. Celui-ci en donne lumineusement la définition et les multiples applications.
     
     
    Bruno Racouchot fondateur de Comes invite également Christian Harbulot à s'exprimer dans le numéro d'avril de son mensuel électronique Communication & Influence sur le sujet suivant : Fabricant d'intox et manipulateurs dans la guerre mondiale de l'information.
     
     
    • Le revue Rébellion met en ligne un article ancien mais toujours pertinent sur la destruction de l'agriculture européenne par la chimie et la mécanisation.
     
     
    Hervé Juvin anime dorénavant  une émission quotidienne sur TV libertés sous le titre "Juvin en liberté". Le première compilation hebdomadaire ci-dessous. Nombreuses analyses très positives. Cependant il s'y exprime pour une forme de "national-liberalisme".
     
     
    • OJIM : en Hongrie, le Fidesz a imposé le pluralisme dans les médias face au monopole détenu jusque là par les post-communistes dans l'expression médiatique. L'Occident affiche sa mauvaise humeur et parle de restriction de la liberté politique des citoyens hongrois...
     
     
    • Atlantico publie une étude sur "Ces facteurs politiquement peu corrects qui déterminent réussite ou échec scolaire des enfants issus de l'immigration". Il s'agit essentiellement d'une analyse qui reprend les observations du psychologue danois Nicolai Sennels dont les travaux font autorité. Selon lui, pour des raisons culturelles les musulmans ne comprennent pas notre façon toute occidentale de gérer les conflits par le dialogue car ils ont été élevés dans une tradition qui accepte volontiers la colère et la violence vis à vis de celui qui a bafoué leur honneur alors qu'en Occident le conflit est géré par des codes utilisant le compromis et l'introspection considérés dans la culture arabo-islamique comme preuve de faiblesse. À cet égard la culture européenne est bien plus proche de la culture asiatique, ce qui expliquerait la propension des jeunes garçons chinois et indochinois à briller plus aisément dans leurs études que les jeunes musulmans.
     
     
    Gabriel Robin, secrétaire général du collectif culture libertés et création (Rassemblement Bleu Marine) s'exprime sur la TAFTA (première référence), ainsi que Jacques Sapir qui s'exprime également sur la candidature de Marine Le Pen aux élections présidentielles (deuxième référence).
     
     
     
    • Du nouveau sur les causes du crash du MH17 survenu au dessus des zones rebelles de l'Ukraine orientale. Il semblerait que la BBC (dans une émission du 3 mai) mette en cause la chasse ukrainienne.  Les Russes l'avaient dit dès le début, mais les Russes mentent comme ils respirent, c'est bien connu. Notons à ce propos que les États-Unis se refusent toujours à livrer les images enregistrées par leurs satellites d'observation.
     
     
    • Ukraine : derrière la guerre des Églises orthodoxes, ce nationalisme que l'on ne veut (toujours) pas voir. Bon article d'Ella Micheletti sur Causeur.
     
     
    • Couverture et sommaire du nouveau numéro (mai-juin) de la Nouvelle Revue d'Histoire.
     
     
    • Premières images du trésor viking découvert en Ecosse en 2015.
     
     

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  • L'offensive judiciaire globale des Etats-Unis...

    Nous reproduisons ci-dessous le texte d'une conférence de Jean-Michel Quatrepoint, donnée devant la fondation Res Publica et cueillie sur le site d'Euro-Synergies.

    Jean-Michel Quatrepoint, qui a publié en 2015 Alstom, scandale d'Etat (Fayard, 2015), explique comment les États-Unis utilisent l'arme du droit contre leurs adversaires économiques...

     

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    États-Unis: Une offensive judiciaire globale

    L’exportation du droit américain, l’extraterritorialité des lois américaines est un processus qui ne date pas d’aujourd’hui. Voilà des années, voire des décennies que les États-Unis développent une stratégie globale d’hyperpuissance en s’appuyant sur un arsenal juridique et en imposant leurs lois, leurs normes, au reste du monde. Il aura fallu l’amende colossale infligée à BNP Paribas (8,9 milliards de dollars) et celle qui, infligée à Alstom (772 millions de dollars), fut la véritable cause, quoi qu’en dise le PDG d’Alstom, de la vente de la division « énergie » à General Electric, pour que nos dirigeants découvrent la réalité d’une guerre économique engagée depuis des décennies. Ils ont ainsi découvert, tardivement, le caractère meurtrier d’un arsenal juridique dont la mise en place remonte à plus d’un quart de siècle.

    Dans la décennie 90, après l’effondrement du communisme, les États-Unis vont se doter d’une série de lois qui concernent les entreprises américaines mais aussi toutes les entreprises étrangères. La majorité de ces lois, Trade Acts ou embargos, permettent aux responsables américains du commerce d’identifier et de sanctionner les comportements « injustes et déraisonnables » des acteurs économiques rivaux des Américains.

    On peut classer ces textes dans quelques grands chapitres :
    Le plus connu aujourd’hui est la lutte contre la corruption, le fameux Foreign Corrupt Practices Act(FCPA) qui s’appliquait aux entreprises américaines qui versaient des pots de vin aux fonctionnaires et aux hommes politiques pour obtenir des contrats. En 1998, ce FCPA est étendu aux entreprises étrangères et il va servir de modèle à la convention OCDE censée réprimer la corruption, notamment en matière de grands contrats.

    Le second chapitre est une batterie de lois qui criminalisent le commerce avec les États sous embargo américain. Certaines de ces lois sont bien connues, telles les lois Helms-Burton et D’Amato qui sanctionnent les entreprises commerçant avec l’Iran, Cuba, la Libye, le Soudan etc. (au total il y aura 70 embargos américains à travers le monde). En 2006, un banquier britannique, un des dirigeants de la Standard Chartered, dira : « Putains d’Américains, qui êtes-vous pour nous dire et pour dire au reste du monde que nous ne devons pas travailler avec les Iraniens ? ». Quelques années plus tard la Standard Chartered devra payer 700 millions de dollars d’amende pour avoir commercé avec l’Iran.

    Autre chapitre, une batterie de lois criminalisent le commerce avec les pays sous embargo ONU.
    Ensuite viendra le blanchiment de l’argent sale des terroristes ou des narcotrafiquants.

    Le Patriot Act, édicté en 2001 après l’attaque sur les Twin towers, sous couvert de lutte contre le terrorisme, donne des pouvoirs élargis aux différentes agences pour accéder aux différentes données informatiques.

    Enfin la loi Dodd-Frank de juillet 2010 confère à la SEC (Securities and Exchange Commission), le gendarme américain de la bourse, le pouvoir de réprimer toute conduite qui, aux États-Unis, concourt de manière significative à la commission de l’infraction, même lorsque la transaction financière a été conclue en dehors des États-Unis et n’implique que des acteurs étrangers. Cela va donc très loin.

    Cerise sur le gâteau, en 2014, le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) donne au fisc américain des pouvoirs extraterritoriaux qui contraignent les banques étrangères à devenir ses agents en lui livrant toutes les informations sur les comptes et avoirs des citoyens américains dans le monde. Si elles n’obtempèrent pas, 30 % de leurs revenus aux États-Unis sont confisqués et, plus grave encore, elles peuvent se voir retirer leur licence. Or, pour une banque, notamment les plus grandes, ne plus pouvoir travailler aux États-Unis et ne plus pouvoir compenser en dollars équivaut à un arrêt de mort. On a souvent voulu voir derrière le FATCA le moyen pour les Américains de faire enfin plier les banquiers suisses, les « gnomes de Zurich », les obliger à abandonner leur sacro-saint secret bancaire. C’est vrai… mais c’est l’arbre, moral et médiatique, qui cache la forêt. Ainsi, BNP Paribas a été contrainte de fournir dans le cadre de son amende la liste des comptes de ses clients américains et franco-américains. C’est ainsi que des personnes fort respectables, qui ont la malchance d’avoir la double-nationalité mais qui ont toujours gagné et déclaré leur argent en France, sans avoir de revenus aux États-Unis, sont sommées par l’Internal Revenue Service (IRS), le fisc américain, de fournir toutes leurs déclarations d’impôts. Si jamais elles ont payé moins en France que ce qu’elles auraient payé aux États-Unis, l’IRS leur réclame la différence. Cela s’appelle du racket.

    Avec le recul, on s’aperçoit qu’il est très difficile de contester chacune de ces mesures : Qui va s’élever contre le fait de lutter contre la corruption… ? De même qui n’est favorable à la répression des narcotrafiquants et du blanchiment de leur argent ? Il en est de même du terrorisme. C’est là toute l’habileté du projet américain théorisé en 2004 par Suzanne Nossel, laquelle a inspiré Hillary Clinton lorsque cette dernière était secrétaire d’État.

    C’est la théorie non du soft power mais du smart power, affirmation par les États-Unis d’une vision universelle au nom de leur compétence universelle.

    Les États-Unis se vivent comme le nouveau peuple élu. Leurs victoires contre les forces du mal (en 1945 contre le nazisme, plus tard contre le communisme), leurs performances économiques, témoignent de la supériorité de leur modèle. Il est donc normal que tous les autres peuples adoptent ce modèle car la globalisation implique l’uniformisation. Les États-Unis énoncent donc de grands principes, valables pour tous et que tous sont contraints de respecter à travers un arsenal juridique, à travers la puissance du dollar, à travers les technologies qui permettent de tout savoir (on pense à la NSA). Le tout, bien sûr, pour le bien commun.

    Cette compétence universelle, par définition, s’applique à toutes les activités humaines. L’offensive contre la FIFA et Sepp Blatter (et par ricochet contre Michel Platini), a été menée par les Anglo-saxons, par les Américains. Une offensive fort habile car chacun sait que la FIFA (Fédération Internationale de Football Association), comme le CIO (Comité international olympique), sont des lieux où le népotisme et la corruption règnent en maîtres. Pour les Américains, il s’agit de faire exploser ce système et de le remplacer par un autre où la puissance américaine sera dominante et imposera ses règles.

    Il est très difficile de s’opposer à ce smart power, véritable idéologie qui s’appuie sur la défense des droits de l’homme, la libre concurrence non faussée, le droit des consommateurs, le droit des minorités etc.

    Cette stratégie s’appuie également sur les ONG anglo-saxonnes. Ce sont elles qui sont à l’origine de l’affaire Volkswagen. Loin de moi l’idée de défendre Volkswagen et l’industrie automobile allemande mais il est intéressant d’observer comment cette affaire s’est déroulée. Au départ, le lobby automobile européen, dominé par les industriels allemands, avait de très bonnes relations avec la Commission européenne et, évidemment, les normes de pollution et de consommation en Europe ont été fixées avec l’assentiment des constructeurs automobiles. Nous avons tous pu constater que l’affichage des consommations des véhicules ne correspond absolument pas à la réalité sur le terrain. Il se trouve que Volkswagen avait misé sur le diesel, invention essentiellement européenne, pour pénétrer le marché américain. Or, aux États-Unis, les normes anti-pollution pour le diesel sont beaucoup plus rigoureuses qu’en Europe, notamment pour les particules fines (on pourrait parler d’une norme protectionniste). Volkswagen a décidé, pour pénétrer le marché américain avec ses véhicules diesel, d’installer secrètement un logiciel fourni par Bosch. Logiciel qui permettait de masquer la réalité de émissions de particules. Ce truquage est découvert par une ONG américaine qui dévoile l’affaire en 2014 et transmet le dossier à l’agence fédérale de protection de l’environnement. C’est alors que l’affaire commence. Volkswagen, qui a effectivement triché, est piégée. Les media s’en mêlent, la machine s’emballe (48 Class actions, dans 48 États différents). La machine de guerre judiciaire américaine s’est mise en branle et le coût pour Volkswagen, indépendamment du coût pour son image, va se chiffrer en dizaines de milliards de dollars. Volkswagen (tout comme sa filiale Audi) avait énormément misé sur les États-Unis : le marché américain devait être le nouvel eldorado pour le constructeur automobile allemand qui espérait s’implanter aux États-Unis, bénéficier du dollar, d’une main d’œuvre moins chère qu’en Europe pour réexporter ensuite des modèles ou des sous-ensembles sur le marché européen et sur l’Asie. Ambition que l’industrie automobile américaine, en plein renouveau, grâce aux subventions données notamment à General Motors, ne voit pas d’un très bon œil. Est-ce un hasard si l’affaire du petit logiciel de Volkswagen a émergé ? Ce qui va se passer sur l’affaire Volkswagen est important car, si les Allemands plaident coupables, ils ont cependant commis un crime de lèse-majesté début janvier en refusant aux prosecutors et aux enquêteurs américains l’accès à leurs données, notamment sur le sol allemand. En effet, quand la machine judiciaire américaine est en branle (les entreprises qui sont « passées dans la moulinette » en savent quelque chose), les enquêteurs américains déboulent et ont accès à tout, mails, documents etc. Or les Allemands, invoquant la German law, qui interdit la communication de données à des puissances étrangères extérieures à l’Union Européenne, ont refusé de donner l’accès aux documents et aux mails internes à leur siège social. Les Allemands iront-ils jusqu’au bout du bras de fer, refuseront-ils d’obéir aux injonctions de la justice américaine? Cela peut se terminer par l’obligation pour Volkswagen de fermer ses usines aux États-Unis. On est là dans un processus lourd de conséquences.

    Les États-Unis, forts de leur puissance, ont donc développé un arsenal juridique tous azimuts. Ils décident qui peut commercer avec qui. Ils peuvent décider aussi d’éliminer les concurrents. Les entreprises françaises en savent quelque chose avec l’Iran. À la différence de ce qui se passait dans les années 80-90, ils bénéficient de la position du dollar: 78 % des transactions mondiales se font en dollars et tout est compensé par les États-Unis. Comme toutes les transactions en dollars transitent par les États-Unis, toute transaction en dollars est soumise à la loi américaine. Ils ont aussi les écoutes : on a découvert que la NSA et les services américains écoutaient systématiquement tout, y compris les chefs d’État… et personne n’a protesté. Et surtout, cette extraterritorialité devient un extraordinaire business qui profite d’abord aux Américains. Les amendes proprement dites commencent à atteindre des montants conséquents. Pour les banques, le total des amendes infligées par la justice américaine est de 125 milliards de dollars, dont une bonne partie concerne les banques américaines. Mais les banques américaines ont été condamnées pour les affaires de subprimes (aucun banquier américain n’a fait de prison) tandis que les banques européennes et japonaises ont été condamnées pour avoir violé des embargos. Les banques suisses ont payé un très lourd tribut pour ne pas avoir communiqué à temps un certain nombre de données.

    On en est aujourd’hui à 35 milliards de dollars d’amendes pour les banques étrangères et une demi-douzaine de milliards de dollars pour les groupes industriels. Sur les dix premières amendes infligées, notamment pour des affaires de corruption, aux groupes industriels, neuf concernent des groupes étrangers. Le record va à Siemens (800 millions de dollars) suivi par Alstom (772 millions de dollars).

    Cet argent sert d’abord à l’auto-alimentation du système judiciaire américain (la SEC, le Trésor, le DOJ etc.) dont les coûts annexes sont considérables. Le système judiciaire américain, les centaines de milliers de lawyers des cabinets, sont embauchés par les entreprises et vivent « sur la bête ». L’argent des amendes fait donc vivre le système judiciaire américain au sens large. S’y ajoute la contestation de brevets etc. L’application de ce système de l’extraterritorialité est un formidable business qui alimente la machine judiciaire et juridique américaine.

    Les gens de BNP Paribas seront sans doute heureux d’apprendre qu’une partie de leur amende va servir à indemniser les citoyens américains qui avaient été victimes de la prise d’otages à l’ambassade des États-Unis à Téhéran en 1979. Plus de cinquante personnes, retenues pendant 444 jours, n’avaient jamais été indemnisées parce que, dans l’accord entre l’Iran et Ronald Reagan, l’Iran avait refusé de payer quelque indemnité que ce soit (l’une des raisons pour lesquelles les Iraniens avaient pris en otage les personnels de l’ambassade américaine était la « prise en otage » par les Américains des compte iraniens à la Chase Manhattan Bank…). Le Congrès a l’intention d’utiliser 1 à 2 milliards de dollars, pris sur l’amende de BNP Paribas, pour indemniser ces ex-otages américains.

    Plus grave : les accords que les entreprises étrangères sont contraintes de signer s’accompagnent généralement de la mise sous tutelle de fait de ces entreprises qui, de par le settlement, l’accord passé avec la justice américaine, subissent pendant six mois, un an, trois ans… la présence de contrôleurs indépendants chargés de vérifier que l’entreprise condamnée se conforme bien à toutes les règles de la compliance américaine. Alcatel Lucent avait été condamnée il y a quelques années à une amende pour corruption à propos d’affaires qui remontaient au début des années 2000 (le montant, moins important que celui infligé à Alstom, s’élevait quand même à 170 millions de dollars). Contrainte d’accepter pendant trois ans la présence d’un contrôleur indépendant, Alcatel Lucent devait lui donner toutes les informations que ce contrôleur jugeait utiles à la réalisation de sa mission. D’aucuns disent que Alcatel Lucent a été ainsi pillée pendant quelques années par la justice américaine. Les secrets de fabrication et un certain nombre de données essentielles peuvent être transférés ainsi à une puissance étrangère.
    L’extraterritorialité du droit américain permet à la puissance américaine, sur les secteurs qu’elle estime stratégiques, d’asseoir sa domination.

    Merci.

    Jean-Michel Quatrepoint (Fondation Res Publica, 1er février 2016)

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